Répétition des signaux à bord des locomotives

Il y a fort longtemps que furent faits les premiers essais de répétition des signaux à bord des locomotives. Ainsi un brevet était pris dès 1857 en Grande-Bretagne et dès 1872 le Nord français utilisait le « crocodile ».

Gros plan sur le « crocodile ».

D'autres préféraient faire confiance à la vigilance du mécanicien jusqu'à ce que, peu avant 1914, à la suite de plusieurs accidents, l'autorité de tutelle invite les réseaux français à adopter après expérimentation des systèmes de répétition des signaux sur les locomotives. Les recherches n'aboutissant qu'à des solutions partielles, les compagnies prirent l'initiative de doubler certains signaux fixes de pétards et, en 1919-1920, le Ministère invita ces compagnies à « doubler par des pétards tous les signaux d'arrêt absolu, les sémaphores,... à moins que ces signaux ne soient munis d'appareils répétiteurs électriques ou mécaniques ». Vers 1925, la répétition électrique par le moyen du crocodile, ainsi que l'enregistrement de la position des signaux, étaient généralisés en France; mais les dispositifs d'enregistrement différaient d'un réseau à l'autre ainsi que les dispositions enregistrées: signaux ouverts et signaux fermés. Ce fut la S.N.C.F. qui unifia un système à la suite,, d'ailleurs, d'un décret ministériel de 1937 imposant le double enregistrement des signaux ouverts et des signaux fermés.

Schéma de mise en charge du crocodile
d'un signal à distance. Répétition par crocodile

Le « crocodile » est un patin métallique de 5,20 m de longueur fixé entre les rails et parallèlement à ceux-ci à quinze mètres en amont du signal répété. Isolé électriquement du sol, il est relié à une source de courant continu par l'intermédiaire d'un commutateur de telle sorte qu'il soit en charge positive par rapport aux rails lorsque le signal est fermé, négative lorsque le signal est ouvert.

Les engins moteurs, ainsi que les remorques d'automotrices et d'autorails et les voitures de rames réversibles équipées d'un poste de conduite, portent une « brosse de contact » constituée de lames d'acier et disposée entre les roues à une hauteur convenable pour assurer un contact électrique au passage sur le crocodile; le courant capté est transmis par un câble aux appareils de répétition et d'enregistrement.

Le passage au droit d'un signal ouvert déclenche une indication sonore brève dans la cabine de conduite; si le signal est fermé c'est une indication sonore continue, de tonalité différente. Dans le même temps, un style trace un petit trait vertical sur la bande d'enregistrement graphique de la vitesse au-dessous d'une ligne de référence si le signal est ouvert, au-dessus si le signal est fermé. Quand le mécanicien voit un signal fermé, il appuie sur un bouton « de vigilance », ce qui provoque l'inscription d'un trait vertical sous la ligne de référence de la bande, et il appuie de nouveau après le passage du signal et déclenchement de l'indication sonore, ce qui a pour effet l'interruption de celle-ci et l'inscription d'une seconde marque verticale sous la ligne .

Bande d'enregistrement

Les signaux répétés par crocodile sont les principaux signaux à distance: avertissement, disque, TIV à distance en forme de losange (tableau indicateur de vitesse-limite)... Quand l'un de ces signaux est porté par un panneau, le crocodile déclenche également l'indication de signal fermé si le panneau présente certains signaux prescrivant l'arrêt ou une marche prudente.

Répétition par balise

Pour les grandes vitesses, et particulièrement si l'on désire répéter et enregistrer plus d'informations que les deux seules transmissibles par le système électrique crocodile-brosse, on utilise des systèmes de transmission à induction. Ainsi, les sections de lignes équipées en bloc automatique lumineux ordinaire (BAL) et spécialement munies de la signalisation de préannonce, pour être parcourues par des trains de vitesse-limite comprise entre 160 et 200 km/h, sont équipées pour la répétition par balise, en plus de la répétition par crocodile qui subsiste pour les trains plus lents (1);(1)Toutefois, le tableau P n'est pas répété par crocodile; de même les engins moteurs affectés à la remorque des trains en question. Une balise installée entre les rails transmet par induction les indications relatives au signal répété à un capteur installé sur la locomotive. Des balises spéciales provoquent la commutation sur l'engin moteur entre la répétition par balise et la répétition par crocodile à l'entrée et à la sortie des sections de ligne à préannonce.

Tableau P annonçant un TIV à
    distance sur une section de ligne à 200 km/h.

La répétition par balise se manifeste par des indications sonores habituelles de signal ouvert ou fermé pour les signaux normalement répétés par crocodile et, pour les signaux de préannonce, par l'indication sonore signal ouvert ou, s'il s'agit d'un feu vert clignotant ou d'un tableau P fermé, par l'indication sonore signal fermé spécialement modulée, accompagnée de l'allumage d'un voyant clignotant: lettre P noire sur fond vert.

A la répétition par balise sont associés non seulement l'enregistrement des signaux répétés mais aussi deux contrôles de vitesse des trains à vitesse supérieure à 160 km/h; ces contrôles déclenchent le freinage d'urgence jusqu'à l'arrêt complet :

  • si quinze secondes après franchissement d'un feu vert clignotant ou d'un tableau P fermé, la vitesse est encore supérieure à 180 km/h (ce contrôle agit aussi après franchissement d'une balise de signal en dérangement);
  • si, au droit du signal préannoncé franchi fermé, la vitesse est encore supérieure à 160 km/h (ce contrôle agit aussi en cas de franchissement à plus de 160 km/h d'une balise de fin de section à préannonce).

En tête d'un train C 200. Le B,
    visible dans le boîtier lumineux au-dessus de l'indicateur-enregistreur de vitesse,
    signifie que le train parcourt une zone à préannonce (répétition
    par balises); peuvent apparaître dans ce boîtier les lettres P (clignotant)
    ou URG (freinage d'urgence).

R.M. - La Vie du rail - décembre 1978
Rubrique: Courrier du rail
Photos: Broncard, Fenino, Noël Neumann